Fonte des glaciers : une cartographie complète révèle l’accélération

Communiqué de presse Résultats scientifiques Terre & Univers
Fonte des glaciers : une cartographie complète révèle l’accélération
A gauche, représentation en fausse couleur des données acquises par les caméras du satellite Terra, ici au-dessus du champ de glace Ha-Iltzuk situé en Colombie-Britannique (Canada). A droite, cartographie de l’amincissement cumulé de ces même glaciers entre 2000 et 2019, en mètres.
© Romain HUGONNET/LEGOS

Une équipe internationale impliquant des scientifiques du CNRS, de l’IRD et de l’Université Toulouse III - Paul Sabatier, avec le soutien du CNES, vient de montrer que presque tous les glaciers du monde s'amincissent et perdent de la masse depuis 2000. S’appuyant sur des observations satellites, leurs résultats montrent que la perte de masse s'accélère sur cette période. Cette étude publiée dans Nature le 29 avril 2021 est la plus complète et la plus précise du genre à ce jour.

Où qu’ils soient, les glaciers fondent à un rythme record. Leur masse a même chuté de 267 milliards de tonnes (gigatonnes) en moyenne chaque année depuis 2000, selon une récente étude. Les pertes globales se sont même accélérées ces dernières années, passant de 227 gigatonnes de glace perdues par an entre 2000 et 2004 à 298 gigatonnes par an entre 2015 et 2019.

Ces résultats sont le fruit de la première cartographie complète et précise des changements d’épaisseur, donc de masse, de tous les glaciers du monde - près de 220 000 - réalisée par une équipe internationale, dirigée par les chercheur.es du Laboratoire d'études en géophysique et océanographie spatiales (LEGOS/OMP - CNRS, CNES, IRD, Université Toulouse III - Paul Sabatier) et impliquant une chercheuse de l’Institut des géosciences de l'environnement (IGE - CNRS, IRD, UGA, Grenoble INP)1 .

Le recul des glaciers et leur amincissement étaient avérés, mais l’ampleur du phénomène restait entachée de fortes incertitudes car trop partiellement mesuré. Les scientifiques se sont appuyés essentiellement sur un demi-million d’images prises depuis 2000 par le satellite Terra. Celui-ci acquiert régulièrement des couples d’images de la surface terrestre grâce à deux caméras, ce qui a permis de créer des séries de modèles numériques de l’élévation des glaciers. La précision spatiale et temporelle de ces résultats atteint un niveau inégalé à ce jour.

L’étude montre que les glaciers fondant le plus rapidement se trouvent dans les Alpes, en Islande et en Alaska. Les taux de fonte ont ralenti entre 2010 et 2019 sur la côte est du Groenland, en Islande et en Scandinavie. Cette décélération locale pourrait être due à une anomalie météorologique qui a provoqué des précipitations plus importantes et des températures plus basses, ralentissant ainsi la perte de glace. La variabilité décennale et régionale des pertes de masse est contrôlée en grande partie par les changements des précipitations. En revanche, l'accélération globale des pertes de masse des glaciers est le résultat de la hausse des températures.

Ces nouvelles observations permettront de préciser les projections de l’évolution future des glaciers pouvant par exemple contribuer à une meilleure anticipation des changements de ressources en eau dans certaines régions de montagne.

Bibliographie

Accelerated global glacier mass loss in the early twenty-first century. Hugonnet, R., McNabb, R., Berthier, E., Menounos, B., Nuth, C., Girod, L., Farinotti, D., Huss, M., Dussaillant, I., Brun, F., et Kääb, A.. Nature, le 29 avril 2021.
DOI:10.1038/s41586-021-03436-z

  • 1Ont également participé à ces travaux des scientifiques : de l’École polytechnique fédérale de Zurich, de l’Université de Zurich et de l’Institut fédéral de recherches sur la forêt, la neige et le paysage WSL en Suisse ; de l'Université d'Ulster au Royaume-Uni ; de l'Université d'Oslo en Norvège ; de l'Université de Northern British Columbia au Canada.

Contact

Etienne Berthier
Directeur de recherche CNRS au Laboratoire d'études en géophysique et océanographie spatiales (LEGOS/OMP - CNRS, CNES, IRD, UT3)
Romain Hugonnet
Doctorant au Laboratoire d'études en géophysique et océanographie spatiales (LEGOS/OMP, CNRS, CNES, IRD, Université Toulouse III - Paul Sabatier)